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vendredi 31 juillet 2009
Au cœur de cette semaine, l’armée algérienne a « ratissé large » dans le Pays Chawi. Un important arsenal de guerre a été employé et déployé pour traquer quelques dizaines de larbins supposés terroristes. En effet des patrouilles, des hélicoptères et de l’artillerie lourde ont été utilisés pour bombarder des foyers de terroristes qui reprennent leurs activités meurtrières. Ces mêmes terroristes ont été libérés peu de temps auparavant par Bouteflika, chef suprême de l’armée algérienne, dans le cadre de la « réconciliation nationale » que nous avons dénonce ici même. C’est devenu un jeu, les terroristes se repentent, Alger les indemnisent, les protègent, les immunise, le tout en guise de reconnaissance pour les services rendus et en récompense pour leurs crimes commis a l’encontre de la population civile.
Si le constat de ces évènements est le même, les interprétations diffèrent. Les chawis pour qui la guerre pour « l’indépendance » n’est pas terminée et ils sont nombreux, croient que l’armée coloniale française a repris ses bombardements au napalm. Les chawis, notamment les plus âgés, pour qui l’Algérie a eu son « indépendance » et n’en ont pas bénéficié, les pires souvenirs et cauchemars, refont de nouveau surface. Et c’est doublement douloureux pour eux. Les chawis pour qui De-Gaulle, en 1962, légua le pays de Thamazgha centrale aux nouveaux colonisateurs estiment que les dernières attaques dans les monts des Aurès est une agression de l’armée algérienne contre le Pays Chawi et une déclaration de guerre. Nous faisons partie de cette catégorie de chawis.
Dans le Pays Chawi, durant la décennie noire, malgré les casernes implémentés un peu partout, l’armée algérienne a abandonné les petites gens, démunies et sans défense, et qui ont fini à leur tour par abandonner leurs biens et notamment les terres de leurs ancêtres pour se réfugier dans les grandes villes.
L’armée algérienne connait tout sur sa proie, les terroristes : les noms, les surnoms, les origines, les provenances et les destinations, les parcours personnels et professionnels, les chefs et les sous-chefs, l’effectif et les réserves, les déplacements et les bivouacs, les dissensions et les discordes.
En plein canicule, l’arme algérienne lance une soudaine offensive. La foret de Kimel, communément appelée la forêt de Ath-Melloul et qui s’étend sur plus de 12000 ha est au centre de cette opération dont la manière et le moment restent controversés et sèment le doute sur l’objectif de ce « large ratissage ».
Dans le Pays Chawi, les dernières années le tissu forestier, du moins ce qu’il en reste, a subi des dégâts importants. Les feux de forets dont l’extinction est laissée aux bon vouloir des dieux des vents et des pluies faute de moyens humains et matériels (calendaires) ont ravagé la faune et la flore et ont engendré une catastrophe écologique sans précédent faute de renouvèlement et de sauvegarde. Quand on a que les pelles... En lançant cette opération sous un thermomètre avoisinant les 50 degré Celsius, l’armée algérienne aggrave la situation et reproduit les méthodes cruelles de l’armée coloniale française. L’armée algérienne qui encerclait la région depuis un bon moment (lire : Le Mont Kimel encerclé par l’armée algérienne), au lieu de mener une vraie offensive pour en finir avec les groupes terroristes ou supposés pour en finir une fois pour toute, réagit à leurs attaques et par intermittence (il y a des mois un ratissage a été mené en réaction à l’attentat qui a fait 9 victimes dans les rangs de l’ANP à M’ziraa puis plus rien jusqu’à l’explosion d’une bombe qui a ciblé la patrouille de Kimel vendredi dernier faisant quatre blessés graves, dont deux militaires et deux gardes communaux). A quoi joue-l’armée algérienne ? Pour nous, citoyens du Pays Chawi, les motivations de l’armée algérienne sont ailleurs.
L’État et ses institutions notamment l’armée sont censés assurer, entre autres, la sûreté de ces citoyens. En Algérie, l’armée est corporatiste et au service d’une oligarchie, tenu et soutenu par ses hauts cadres. L’armée algérienne n’est ni nationale ni populaire. Dans le Pays Chawi, c’est aux Groupes de Légitime Défense (GLD), enfants du pays déshérites et engagés pour subvenir au besoin de leur famille, recrutes pendant la décennie noire par l’armée algérienne pour palier à l’insuffisance de son effectif et faire face à la recrudescence des actes de violence liés aux terrorisme des intégristes islamistes assassins, sont les premiers a être déployés devant le front pendant que certains font des affaires et négocient avec les « Émirs », chef terroristes, que l’armée algérienne est supposée combattre. Ces « tirailleurs sénégalais » de l’armée algérienne, des « sous-traitant de la guerre », sont les premiers fusibles qui sautent dans la chaine de montage d’une situation de paix-guerrière négociée à l’algérienne. Leur situation est précaire alors que l’armée algérienne s’installe paisiblement dans le Pays Chawi. Deux poids et deux mesures.
« La réconciliation nationale » décidée en 2005 est toujours d’actualité et n’est nullement remise en cause par les politiques d’Alger. Le terrorisme islamique non plus, il demeure.
L’axe M’sila, Biskra, Batna, Khenchela, Tebessa et El Oued est devenu une plaque tournante d’un trafic important de drogue, d’armes et du foncier. Des raisons dont la pertinence ne peut échapper même au plus néophyte en matière de stratégie militaire. Seule la population civile paie le lourd tribut : exode forcé, « terrorisme social », expropriation, économie de guerre, catastrophe écologique...
S’agit-il d’une pièce de théâtre dont les acteurs sont à la fois les « terroristes islamistes » et une partie de l’armée algérienne ? Si c’est le cas, nous pouvons affirmer sans hésitation qu’il s’agit d’un « terrorisme d’État », déguisé, organisé par establishment.
Les dépenses publiques faramineuses distribue par Alger pour bien vendre son image ( 3 milliards de dollars alloués à la construction de la grande mosquée d’Alger, 70 millions d’euro alloués à « Alger, capitale de la culture arabe », 100 millions de dollars alloues à l’organisation de la deuxième édition du festival culturel panafricain (PANAF), 360.000 euros alloues par l’Algérie pour la construction de la mosquée de Marseille) est un budget largement suffisant pour éradiquer le terreau du terrorisme et financer des vrais projets de développement pour les habitants de Kimel, Meg Azugagh et Adrar Aziza, lieux des derniers bombardements de l’armée algérienne.
Hier le Pays Chawi et la Kabylie étaient les poumons d’une guerre de libération anticoloniale et aussi le centre d’une répression féroce menée par l’armée française contre les fiefs de la résistance. Aujourd’hui et au même moment, les deux régions subissent les pires des représailles menées par l’armée algérienne. L’histoire se répète et se ressemble. Sans oublie les évènements du M’zab et la guerre des Twarag. Un pire hasard ou un ajustement de calendrier du processus d’extermination du peuple amazigh.
Ichawiyen Autrement, le 30 juillet 2009
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