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#1 03-09-2009 17:52:09

Administrateur
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Date d'inscription: 10-07-2009
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Exploration du Medghessan -Revue africaine numero 1

« Un monument fort remarquable qui remonte à cette époque,
et qui existe encore dans un bel état de conservation, me paraît fournir
une des premières et des principales données pour la solution de ce problème
historique.
« Entre Zéna (l’ancienne Diana ) et Tezzout (l’ancienne
Lambæsa(1)), sur la limite orientale de la plaine d’El Mahdek, au pied
du Djebel bou ‘Arif, l’un des contreforts des monts Aourès, il existe un
monument ancien fort connu, que les habitants désignent sous le nom
de Medr’acen . Suivant eux, il est antérieur à la période romaine et
servait à la sépulture des rois indigènes.
« Il est impossible de méconnaître dans Medr’acen le pluriel berber
d’un adjectif formé de . Ce monument était consacré aux descendants
de Madr’es(2). A part la tradition vague que nous venons de
rapporter, les Indigènes, Arabes ou Berbers, ignorent complètement la
signifi cation de ce mot.
« Au reste, personne n’avait encore signalé cette corrélation remarquable
entre un monument très-curieux par lui-même et les annales
du peuple africain. »
A notre avis, cette opinion, en la restreignant à l’origine de la
dénomination Medr’acen, nous parait être la plus satisfaisante, parmi
toutes celles qui ont été hasardées sur ce monument. Elle est certainement
plus probable que celle qui a été exposée par M. A. C., dans l’Annuaire
archéologique de la province de Constantine (p. 180 ), M. A. C.
veut que ce soit le Mausolée du roi Aradion tué en combat singulier par
____________________________________________________________
(1) Il faut lire Lamboesis. — N. de la R.
(2) Ebn Khaldoun place dans la province de Constantine et particulièrement
dans l’Aurès des tribus qui descendent de Mad’rès (T. I. p. 232 et suivantes). — N.
de la R.

Probus ; et il voit dans le mot medr’acen une abréviation et une
contraction des mots Tumulus Aradionis, Monumentum Aradionis, ou
Sepulchrum Aradionis. Nous croyons que le lecteur n’hésitera pas entre
cette étymologie un peu forcée et celle que M. Carette propose.
Au reste, le texte de Flavius Vopiscus est formel : pugnavit et
singulari certamine contra quemdam Aradionem, in Africa… » (v.
chap. IX). La scène se passe donc dans la province d’Afrique et non
dans celle de Numidie. On ne voit pas non plus, dans le seul texte qui
nous ait conservé le souvenir de cet événement que la victime fût un
roi, ni même un chef de tribus africaines. On peut le supposer, mais
on ne doit pas le donner comme certain.
L’article de M. Becker (p. 108 et suivantes de l’Annuaire)
contredit formellement celui que nous venons d’analyser. M. Becker,
qui a étudié ce monument en architecte, y voit « peut-être le seul
édifi ce, encore debout, qui marque la transition entre l’art égyptien
et l’art grec. » Il déclare même que « tous les entrecolonnements
étaient chargés d’hiéroglyphes, de caractères étranges que le temps
a presque effacés. » Une construction de l’époque de Probus (fi n
du 3e siècle de notre ère) ne donnerait pas lieu à de pareilles réfl
exions.
Nous avons vu ce curieux monument ; et ce qui nous a frappé,
tout d’abord, c’est sa ressemblance, comme forme générale, avec le
Tombeau de la Chrétienne que Pomponius Mela appelle « la sépulture
commune de la famille royale », celle de Juba II, sans doute.
Nous avons pensé que Juba II a voulu construire dans la Mauritanie,
qu’il recevait d’Auguste en échange des États de ses ancêtres, une
sépulture royale semblable à celle qui existait déjà en Numidie.
En un mot, le Medr’acen nous a paru être la tombe commune
des rois indigènes qui avaient leur capitale à Cirta, comme le Kobeur
Roumia, imitation de ce monument primitif, devint sépulture royale à
son tour, à l’époque où la famille des Juba alla régner en Mauritanie.
En fait d’hiéroglyphes et de caractères étranges, nous avons vu
sur le Medr’acen quelques noms propres écrits en arabe ; et, dans la
même langue, les formules religieuses Bismillah et Hamdoullah. Ces
lettres étrangères, assez mal tracées du reste, ont pu facilement passer
pour des caractères étranges, voire même pour des hiéroglyphes,
aux yeux d’un observateur qui peut-être ignorait l’arabe. Nous avons
bien entendu un touriste qualifi er d’inscription phénicienne un cheval
grossièrement gravé sur le parement de cet édifi ce, par quelque enfant
du voisinage !
M. Becker nie implicitement que l’entrée du Medr’acen ait jamais
été trouvée (p. 115). Cela est grave, car nous avons sous les yeux un
dessin signé du promoteur des recherches qui y ont été faites en 1830 et
où fi gure cette entrée, avec coupe, plan et élévation d’icelle. Bien plus,
dans le rapport joint à ce dessin, on lit tout ce détail des opérations :
« M. le capitaine C., avant de découvrir le caveau (du Medr’acen)
avait recherché soigneusement les traces d’une communication que
nous soupçonnions exister entre le centre du monument et l’extérieur. Il
est presque convaincu qu’il n’en existe pas (d’apparente). Il avait bien
recherché des portes ; mais après des investigations minutieuses et de
grands travaux, il a dû renoncer en trouver.
« Il n’en a remarqué que de fausses, sans orientation aucune, et
simulées par des moulures exécutées dans la partie basse ou cylindrique
du monument. Il en soupçonne une autre qui serait placée dans la partie
ouest et cachée par l’éboulement.
« Le résultat principal obtenu par ces fouilles a été la découverte,
— non du couloir que les Arabes indiquaient comme pouvant conduire
à l’intérieur et qui n’est qu’un trou sans issue, — mais du couloir véritable
qui précède le caveau.
« La porte d’entrée, de ce couloir est située à l’Est plein et formée
d’une seule pierre rectangulaire de 1 m. 60 c. de hauteur, 1 m. 10 c. de
largeur, 50 c. d’épaisseur; laquelle a été reconnue avoir été glissée perpendiculairement
entre deux pierres taillées exprès, en coulisses, d’une
forme toute particulière, pour la recevoir. Elle commence un peu audessous
du 3e gradin, à partir du socle(1) et est sur le prolongement de
la contremarche du 4e ; elle descend à peu près au niveau du socle. Les
pierres qui formaient le 3e gradin et sa contremarche, et dérobaient la
porte de ce caveau à la vue, manquent en cet endroit. Ces deux pierres
s’encastraient dans les 2e et 4e gradins dans le dessus de la porte du
caveau ( Voir les dessins du Medr’acen, pl. 2e, n° 6).
« D’après ce qui précède, cette porte mystérieuse était masquée
dans le revêtement extérieur et n’aurait pu être découverte qu’en
____________________________________________________________
(1) On a, sans doute, voulu dire entablement. — N. de la R.

démolissant le monument, si un hasard, habilement exploité, à la suite
d’essais longs et infructueux, ne nous en avait livré le secret.
« Cette porte n’était point connue des Arabes ; elle n’avait jamais
pu être aperçue par personne, puisqu’elle était entièrement et
naturellement masquée jusqu’à ce jour par le corps d’un olivier ayant
0, 40 de diamètre, 3 mètres de hauteur et 5 mètres d’envergure ; il
avait pris racine dans la place laissée vacante après la disparition des
deux pierres et cachait l’entrée du caveau. L’enlèvement de cet arbre
— et il y en a beaucoup sur le monument — a pu seul permettre de
remarquer la forme singulière des pierres.
« Lorsqu’on est placé sur le 3e gradin, après l’enlèvement de
l’olivier, on ne voit que la partie supérieure de cette porte qui a son
angle droit cassé; le reste disparaît dans la massif. Cette circonstance
a été favorable à M. C., puisque le trou, par suite de cette cassure, a
livré passage à un voltigeur et a donné les moyens de commencer les
déblais.
« A l’entrée du caveau, on a trouvé et déblayé un escalier de six
marches de 0, 50 c. de hauteur sur 0, 37 c. de large. Tout porte à croire
qu’il n’y en avait pas davantage et que la 6e est au niveau du caveau
ou d’un pallier.
« Cet escalier descend dans un couloir de 2 m. 40 c. de hauteur
sur 1 m. 19 c. de largeur dont les parois sont revêtues de pierres de
taille et dont le ciel est formé de longues pierres portant sur les deux
parois.
« Toute cette partie, jusqu’à deux mètres au-delà et au niveau
de la dernière marche, est parfaitement conservée. M. C. a fait, à cette
hauteur, une fouille de 1 m. de profondeur, de laquelle il a retiré des
ossements humains et un fragment de lampe en métal (voir planche 2e
Madr’acen, n° 7, pour ces fouilles. Ces dessins sont de MM. C. et H.)
« Malheureusement, je ne puis parler de la conservation du caveau
placé après le couloir, lequel est en partie ou en totalité détruit,
par suite de l’affaissement de la plate-forme, du revêtement de la partie
supérieure et de l’éboulement intérieur. La diffi culté que présente
le déblai de l’entrée du caveau, par suite de l’éboulement, ne pouvant
être surmontée que par un grand travail d’étaiement, dirigé par des
hommes de l’art, j’ai défendu d’exposer nos travailleurs à ce danger
et rappelé à Batna M. C. très heureux de sa réussite. »
« Grâce à sa persévérance, cet offi cier a découvert encore, à hauteur
du soubassement et vis-à-vis de l’entrée du caveau, une plate-forme
rectangulaire plus longue que large, adhérente audit soubassement par
un de ses petits côtés que j’appellerai le 4e. Cette plate-forme établie
dans le roc se compose de deux assises de pierres de taille ; la première
a sur ses trois faces une largeur de 0 m. 30 centimètres de plus que la
seconde et forme comme le commencement d’un escalier. Le dessus de
cette plate-forme est uni et recouvert, sur une épaisseur d’un centimètre,
d’un asphalte rouge qui a conservé tout son éclat. Un fragment du bras
d’une statue en pierre a été trouvé au même endroit ; il est également
recouvert d’asphalte.
« Enfi n, il existe, vis-à-vis du milieu de la face extérieure de la
plate-forme, un trou dans le roc de 0 m. 20 c. de diamètre sur 0 m. 80 c.
de profondeur.
« Il est diffi cile de se faire une opinion sur l’usage de cette plates
forme qui ne devait pas être sans importance, puisqu’elle est elle-même
au milieu d’une enceinte carrée dont le monument forme la 4e face. »
Nous avons tenu à reproduire tous ces détails, parce que nous
avons trouvé dans la province de Constantine beaucoup de personnes
qui révoquaient en doute les recherches faites au Medr’acen, dès 1850,
et les résultats alors obtenus. N’ayant vu ce monument considérable
qu’en passant et sans avoir le temps de l’étudier comme il serait nécessaire,
ces personnes ont cru facilement, parce qu’elles n’avaient rien
remarqué, que rien n’avait été fait.
Le renseignement très-offi ciel que nous venons de donner leur
prouvera qu’elles se trompent et les engagera peut-être à faire au monument
numide des visites un peu plus sérieuses.

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